Support originel des crypto-actifs, la blockchain se diffuse désormais à d’autres champs d’application que ceux de la banque et de la finance. La blockchain permet de réaliser une transaction entre deux parties sans avoir à recourir à un tiers de confiance ou une autorité centrale, la transaction étant enregistrée et cryptée sur des registres distribués répartis sur des milliers de serveurs à travers le monde. Se dessine, à travers cette définition, les aspects des métiers du chiffre pouvant être impactés par la blockchain.
La blockchain offre une garantie sur l’exécution de certaines tâches
Tout d'abord, la blockchain apporte une solution différente en matière de contrôle des données. L’enregistrement des transactions est irrévocable, horodaté et infalsifiable. Il n’est donc plus nécessaire d’avoir recours à des audits pour faire attester de la véracité des livres comptables. La blockchain supprimerait donc la mission de vérification des comptes de l’auditeur. Encore, elle permettrait une évaluation continue des documents financiers.
D’autres tâches vont également pouvoir être automatisées à travers cette nouvelle technologie. C’est notamment le cas du processus de facturation. Si la blockchain ne permet pas de réduire le nombre de saisies comptables, elle permettrait de mieux les gérer grâce à une exécution en cascade de smart contracts.
Evolution des missions des professionnels du chiffre
Si la blockchain supprime la vérification des comptes, la présence de l’auditeur sera encore nécessaire pour désormais vérifier et certifier l’existence des opérations inscrites dans la blockchain.
S’agissant des nouveautés qui pourraient naître de l’utilisation de cette technologie, il faut penser au fait que la comptabilité actuelle n’est pas adaptée aux crypto-monnaies. L’expert-comptable aura alors tout un travail de compréhension des différents flux financiers des entreprises et de traduction dans l’écriture comptable.
Quoi qu'il en soit, l'existence des professionnels du chiffre n'est en rien menacée. Leur intervention sera toujours nécessaire pour attester de la qualité de l’information entrée dans le système car les parties peuvent toujours se tromper ou être de mauvaise foi. En outre, d’autres vérifications ne pourront être garanties par la blockchain, comme par exemple l’existence d’un lien ou d’une entente entre les parties hors de la chaîne.
Concrètement, il est probable que l’utilisation de la blockchain aura pour principale conséquence de faire du conseil la mission centrale des experts-comptables. En effet, il s’agit du service à la plus forte valeur ajoutée qui ne peut être pris en charge par les nouvelles technologies.
Des changements progressifs
Le recours à la blockchain, deuxième plus grande avancée après la diffusion d’internet, nécessite forcément l’acquisition de nouvelles compétences. En effet, la comptabilité actuelle n’étant pas adaptée au système de la blockchain, il est nécessaire de créer ou d’adapter les schémas d’écritures par analogie avec d’autres déjà existants.
En l’absence de formation existante, seuls les professionnels qui se forment eux-mêmes sont pour l’instant en capacité de remplir cette mission de consulting. Avant d’appliquer la blockchain aux métiers comptables, il sera nécessaire de modifier les formations initiales et de créer de nouvelles formations continues comprenant l’apprentissage du langage informatique et des systèmes de sécurité informatique. Dans cette perspective, peut-être existera-t-il un jour un nouveau métier d'« informaticien-comptable ».
Lisa Saccard