Entreprises de services financiers : se moderniser grâce à l'automatisation des processus

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Une tribune de Jakob Freund, CEO de Camunda, société allemande de conseil en gestion des processus métier proposant, entre autres, une plateforme d'automatisation des flux de travail et de décisions.

De nombreuses entreprises de services financiers ont déjà entamé leur parcours d'automatisation des processus. Pour certains, la pandémie a forcé l'adoption des services numériques. Pour d'autres, la transformation numérique justifie un sentiment d'urgence associé à l'automatisation. En fait, 96 % des responsables informatiques estiment que l'automatisation des processus est essentielle pour accélérer leurs objectifs de transformation numérique. Malgré cela, nombreux sont ceux pour qui la modernisation ressemble trop à une course d’obstacles. Trois décideurs sur cinq décrivent la transformation numérique comme « difficile à réaliser ».

Pour de nombreux établissements de services financiers, l'adoption de l'automatisation n'est pas nécessairement le chaînon manquant. Mais plutôt une orchestration réussie des processus automatisés couvrant diverses parties mobiles, ou endpoints des processus. Un autre défi majeur est la complexité des processus, qui doivent être clairement définis, orchestrés étape par étape et gérés au fil du temps.

Grâce à l'orchestration des processus, les fournisseurs de services financiers peuvent relever les défis actuels en constante évolution, notamment la mise à jour des systèmes existants, le respect des exigences en matière de conformité et de risque, et l'amélioration de l'expérience client. Examinons comment.

Mise à niveau des systèmes hérités

Les systèmes hérités sont omniprésents dans les services financiers. En coulisses, ils exécutent des processus critiques, parfois avec une technologie vieille de plusieurs dizaines d'années. Plus de 800 milliards de lignes de code COBOL, un langage de programmation développé en 1959, sont encore utilisées aujourd'hui sur des systèmes mainframe. L'efficacité de ces systèmes n’est pas le seul défi. La main-d'œuvre chargée de leur maintenance sera bientôt à la retraite. Rien qu'au cours des cinq dernières années, les équipes ont perdu 23 % des spécialistes des mainframes, 63 % de ces postes n'étant pas pourvus.

Le remplacement pur et simple de ces systèmes n'est pas envisageable. Nombre d'entre eux traitent des transactions représentant des millions, voire des milliards de dollars. En revanche, les systèmes existants peuvent être orchestrés pour fonctionner avec des logiciels modernes, jusqu'à ce que les ressources techniques puissent être consacrées à leur réarchitecture ou à leur réécriture, composant par composant. De nombreuses équipes de services financiers adoptent une approche progressive de la modernisation en utilisant des outils d'intégration des workflows SaaS, ou d'automatisation des processus robotiques (RPA), sur l'interface utilisateur du système existant.

Ces outils permettent le plus souvent d'automatiser des processus « locaux », ou des automatisations spécialisées pour exécuter une tâche simple ou une série de tâches. Cependant, lorsque les processus interagissent entre eux, ou sont plus complexes qu'une simple succession d’étapes linéaire, l'orchestration des processus peut accélérer le processus de modernisation. L'orchestration permet de relier et de « piloter » des endpoints de processus disparates, avec des éclairages pertinents sur les zones d’efficacité et d’amélioration. Ainsi, les processus fonctionnent ensemble avec efficacité, de bout en bout, et non plus en îlots. Par exemple, plusieurs bots RPA automatisant des processus uniques au sein d'un système existant peuvent être orchestrés ensemble. À terme, l'équipe d'ingénieurs peut se concentrer sur la réécriture de ces bots un par un en tant qu'applications basées sur des microservices, et sur l'orchestration de ces applications parallèlement à la RPA, jusqu'à ce que le système existant puisse être entièrement supprimé.

Un rythme adapté à la gestion moderne de la conformité et des risques

Pour les services financiers modernes, les exigences en matière de conformité et de risque peuvent évoluer avec une rapidité excessivement surprenante. S'adapter à ces exigences peut être déstabilisant, si les entreprises ne sont pas prêtes à évoluer aussi rapidement. À titre d'exemple, l'effondrement récent de la Silicon Valley Bank et de la Signature Bank pourrait accroître l'intérêt des tests de résistance bancaires aux yeux des régulateurs. Les entreprises peuvent adopter l'automatisation et l'orchestration comme déclencheur d'alerte précoce en fonction des indicateurs économiques, signalant aux équipes qu’il serait judicieux de réévaluer leurs portefeuilles avant l’arrivée de problèmes de liquidité ou autres difficultés sur le marché.

De nombreux autres contrôles de conformité, allant des vérifications de routine KYC/AML dans le traitement des cartes de crédit au transfert des données des clients, peuvent donner d’excellents résultats en investissant une attention méticuleuse dans des opérations d'automatisation et d'orchestration. Comment ? En utilisant des cadres de modélisation des processus, tels que le BPMN (Business Process Model and Notation), les équipes peuvent concevoir des processus de bout en bout, qu'il s'agisse de workflows pilotés par des machines ou de flux de travail humains. L'orchestration des processus basé sur un cadre BPMN facilite la définition des flux de travail humains au sein des systèmes automatisés, très courants dans le domaine de la conformité. Ainsi, même si un système technologique produit une erreur, cela ne retardera pas un renforcement ou une vérification humaine.

Répondre aux exigences des clients en matière d'expérience numérique

De nombreux pionniers du numérique ont proposé des solutions plus pratiques aux clients, remettant en cause le tissu des services financiers traditionnels. En réponse, les institutions financières de longue date intensifient leur stratégie numérique, offrant des services tels que la banque de détail et la banque d'affaires numériques, des règlements de transactions plus rapides, etc. L'objectif est d'éliminer les frictions pouvant affecter l'expérience client, chaque fois que cela est possible. Cet objectif exige un degré d'automatisation plus élevé pour de nombreuses entreprises de services financiers.

Certaines entreprises peuvent avoir lancé des produits numériques à la hâte pour faire face à la concurrence, ce qui a entraîné une fragmentation de l'expérience client ou un manque d'efficacité. Les parcours clients omnicanaux, ou ceux qui s'étendent sur plusieurs canaux, y compris en personne, les services en ligne ou le chat, et les centres de contact, peuvent s'avérer particulièrement contraignants et difficiles. Tout comme pour les défis de conformité et de risque déjà mentionnés, les entreprises peuvent utiliser BPMN pour concevoir des processus automatisés et efficacement orchestrés, qui intègrent avec succès ces canaux, afin d’assurer la continuité attendue par les clients. Lorsqu’un processus bout en bout est en place et fonctionne avec succès, il peut être reproduit comme modèle de conception dans d'autres processus, au lieu de réinventer la roue.

Jakob FreundPour conclure, de nombreux établissements de services financiers ont déjà adopté un certain degré d'automatisation. Quel que soit leur stade d'avancement, l'intégration de l'orchestration des processus peut contribuer à unifier des endpoints de processus diversifiés et à exécuter des processus complexes. En exécutant avec succès ce type de stratégie, une entreprise peut améliorer l'efficacité de ses systèmes existants, rester à la hauteur des exigences de la conformité moderne et de la gestion des risques, rationaliser l'expérience client, et en finalité prendre et garder une longueur d'avance sur la concurrence.

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