Les réseaux sociaux, un passe-temps pour certains, un métier pour d’autres. Une communication directe avec ses « followers » mais également avec le fisc... depuis une nouvelle mesure prévue par la loi de finances pour 2020 et visant à repérer d'éventuelles fraudes.
Les réseaux sociaux, une surveillance de masse
Cette surveillance de masse est réalisée par un algorithme utilisé par Bercy, qui traite toutes les données publiques présentes sur les réseaux sociaux ainsi que sur des plateformes de commerce telles que leboncoin, eBay, etc.
Cette mesure est régie par l’article 154 de la loi de finances pour 2020, un dispositif « à titre expérimental et pour une durée de trois ans, pour les besoins de la recherche des manquements et infractions mentionnés ».
Pendant la période d’expérimentation, l’administration fiscale et celle des douanes ont ainsi la possibilité d'exploiter les contenus librement accessibles sur les différentes plateformes. Le tout afin de limiter les fraudes. Ne seront exploités que les contenus publiés sciemment et qui ne nécessitent pas de mot de passe ou d’inscription sur le site concerné. L'avocat Anthony Bem indique sur Franceinfo qu’« il n'y a aucune violation ou atteinte à la vie privée si ces contenus diffusés sur la toile – commentaires, vidéos ou photos – sont publics ».
Avec la crise du Covid, le nombre d’utilisateurs sur les réseaux sociaux a augmenté. Les plateformes proposent ainsi une quantité colossale de données pour le fisc. Selon l'avocat Jean-Philippe Mattei interrogé dans L'Express : « C'est un indicateur qui permet de lancer des investigations. Cela peut à la limite être une preuve complémentaire de la preuve principale. Dans le cas d'une domiciliation fictive, l'administration pourra par exemple demander des informations à des compagnies aériennes. »
Une mesure encadrée pour protéger les données personnelles
Cet algorithme est surveillé par les agents des administrations concernées qui sont chargés du bon fonctionnement du traitement des données. Leur mission est de s'assurer que les données sont liées à la recherche de manquements ou d'infractions. A cet effet, les informations récupérées doivent être détruites au plus tard cinq jours après leur captation.
La protection des données est un sujet central de société. C’est pourquoi les usagers ont la possibilité d’avoir accès aux informations collectées les concernant, mais également disposent d'un droit à la rectification ou à l'effacement de ces données, ou encore à la limitation de leur traitement. Exception faite lors d’une procédure pénale, où les données sont conservées jusqu’au terme de celle-ci.
L'avocat Anthony Bem poursuit en indiquant que « la copie d'écran d'un statut Facebook par exemple ne suffit pas, il faut la faire valider par un constat d'huissier. En cas de contentieux, les justiciables pourraient soulever des vices de procédure. Le fisc continue d'avoir la charge de la preuve, le contribuable peut contester le redressement et ses droits ont été renforcés dans le cadre de la loi sur le droit à l'erreur ».
Il reviendra à la Cnil d'établir, à la fin de cette expérimentation de trois ans, si des dérives ont eu lieu concernant le respect de la vie privée.
Emma Valet