A la suite de la loi PACTE, la question de l’indemnisation des commissaires aux comptes victimes du rehaussement des seuils d’audit apparaît comme un point particulièrement sensible. Lors du Campus CAC organisé le 17 septembre 2019 par l’IFEC, l’avocat Alexandre Riquier a présenté le dispositif opérant en la matière.
Pour un certain nombre d’auditeurs, la loi PACTE constitue un véritable désastre, induisant une très large perte de chiffre d’affaires… Alors, comment faire face ? Comment obtenir réparation du préjudice ? L’avocat Alexandre Riquier a fait le point sur la question lors du Campus CAC de l’IFEC le 17 septembre dernier.
Comment demander réparation et quels arguments avancer devant le juge ?
Sur la procédure, il convient de suivre successivement deux étapes : effectuer une demande préalable indemnitaire auprès de la garde des Sceaux puis en cas de refus, saisir le tribunal administratif.
La demande indemnitaire doit être effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception. Elle doit être motivée et chiffrée. Une prescription de quatre ans s’applique en la matière. Et s’agissant de l’action en justice, l’assistance d’un avocat est obligatoire, le délai de recours est de deux mois et le juge a la possibilité de moduler, à la baisse, le montant de l’indemnisation demandée. Des recours en appel, en cassation voire devant la CEDH sont ensuite envisageables.
Selon Alexandre Riquier, deux arguments majeurs pourront être défendus afin d’obtenir gain de cause. Tout d’abord, engager la responsabilité de l’État du fait des lois. Une piste qui suppose d’apporter la preuve d’un préjudice grave et spécial, sachant que la perte de la majorité du chiffre d’affaires du cabinet serait susceptible d’emporter une telle qualification. Ensuite, rechercher la responsabilité de l’État pour méconnaissance des engagements internationaux de la France serait également envisageable. A charge alors pour les auditeurs de démontrer que le gouvernement est passé outre la CEDH en restreignant leur périmètre d’intervention, sans qu’une cause d’utilité publique ne justifie cette mesure.
« Certains professionnels auront effectivement le droit à une indemnisation »
Interrogé par le Monde du Chiffre sur les chances de succès des commissaires aux comptes d’obtenir gain de cause, l’avocat Alexandre Riquier déclare : « Les chances de succès sont individuelles. Chaque dossier est différent et doit faire l’objet d’un examen attentif de la part de l’avocat qui traitera le sujet. En revanche, ce qu’il faut savoir, c’est que la responsabilité du fait des lois est un régime exceptionnel qui a assez peu été mis en œuvre et qui laisse une fenêtre de tir, si je peux me permettre de m’exprimer ainsi, assez mince. Malgré tout, les débats parlementaires tout comme l’avis du Conseil d’État, laissent cette voie ouverte et on estime que certains professionnels auront effectivement le droit à une indemnisation s’ils démontrent un préjudice grave et spécial sur leur activité. »
Hugues Robert