Une tribune de Frédéric Thienpont et Pauline Combes, juristes fiscalistes au sein du cabinet d'expertise comptable GMBA.
Au 1er janvier 2019, toutes les entreprises devront avoir mis en place le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Elles deviendront de facto collectrices de l’impôt : à compter de cette date, la collecte et le reversement de l’impôt sur le revenu seront transférés aux tiers collecteurs qui en deviendront les débiteurs légaux. Ce qui n’est pas exempt de risques pour les entreprises. C’est dans ce contexte qu’un amendement a été adopté par le Sénat le 20 mars 2018 dans le cadre du projet de loi pour un Etat au service d’une société de confiance, visant à exonérer les entreprises de moins de 21 salariés du paiement des pénalités prévues en cas d’omission ou de retard déclaratif pendant les deux premières années à condition que « la bonne foi de l’entreprise soit reconnue ».
Initialement, le dispositif prévoyait des sanctions très lourdes envers les entreprises en cas d’erreur, qui ont été jugées par la suite disproportionnées et ont été amoindries par la loi de finances rectificative pour 2017. Les nouvelles obligations dues à la mise en place du prélèvement à la source seront néanmoins accompagnées de sanctions en cas de retards, insuffisances ou défauts lors du versement de la retenue. Ainsi, les sanctions s’élèveront à 5 % des retenues qui auraient dû être effectuées ou déclarées au collecteur en cas d’omission ou d’inexactitude et 10 % en cas d’absence de dépôt dans les délais (avec une sanction minimum de 250 euros).
Ces nouvelles obligations et leurs sanctions inquiètent les employeurs et notamment les petites entreprises pour qui les coûts de la mise en place du prélèvement à la source par salarié ainsi que les risques d’erreurs sont les plus élevés du fait des difficultés qui pourront être rencontrées dans la gestion des nouvelles formalités administratives : confidentialité, assiette et application du taux, prélèvement, reversement de l’impôt, etc. Cela pouvant s’avérer d’autant plus complexe lorsque l’entreprise a recours à des contrats « courts » (CDD, intermittents, alternants, stagiaires).
Par le passé et à titre comparatif, les TPE ont déjà rencontré de nombreuses difficultés lors de l’intégration de la déclaration sociale nominative (DSN), obligatoire depuis le mois de janvier 2017. Et près de 30 000 TPE n’auraient pas encore intégré la DSN au sein de leur organisation selon Pascale Gruny, rapporteuse du texte à l’Assemblée.
Pour les entreprises ayant déjà intégré la DSN, elles devraient bénéficier d’une mise en place simplifiée du prélèvement à la source, les informations liées au prélèvement étant transmises par le même système informatique. Pour les autres entreprises, la mise en place de la retenue à la source risque de s’avérer compliquée et bénéficier d’un droit à l’erreur pendant deux ans serait salvateur. Si le vote de la loi venait confirmer la mise en place de ce droit à l’erreur pour les entreprises de moins de 21 salariés, nous aurions l’exemple d’un Etat qui accompagne plutôt qu'il ne sanctionne les entreprises.
Frédéric Thienpont, Pauline Combes, juristes fiscalistes au sein de GMBA