En 2022, les créations d’entreprises ont encore augmenté, et ce sont les micro-entreprises qui sont les plus dynamiques. Pascal Ferron, vice-président de Walter France, et fondateur de la solution MonEntrepriZ dédiée aux micro-entrepreneurs, explique pourquoi ce phénomène est une tendance de fond, un véritable phénomène sociétal.
Les chiffres sont tombés : en 2022, plus d’un million d’entreprises se sont créées. Parmi elles, 60 % sont des micro-entrepreneurs, confirmant ainsi le fait que ce statut, loin d’être un épiphénomène comme certains le prédisaient, est bien un engouement à long terme des Français.
L’entreprise individuelle « standard » à la peine, la micro-entreprise en pleine croissance !
En 2022, selon les chiffres de Bpifrance, 27,4 % des entreprises se sont créées sous forme de sociétés, 11,4 % sous forme d’entreprises individuelles, et 61,2 % sous forme de micro-entreprises. Par rapport à l’année précédente, la progression de ces micro-entreprises est de 2,8 %. Malgré l’ambiance morose, cette hausse de 2,8 % en 2022 fait suite à 9 % de hausse moyenne continue sur les dix dernières années, soit largement plus que la moyenne de 6 % de création de sociétés.
Attention d’ailleurs à l’interprétation des chiffres : si la progression des sociétés atteint 4,8 %, ce pourcentage doit être relativisé. En effet, parmi les activités en croissance, la « production d’électricité » est en hausse de 100 % ; or il s’agit le plus souvent uniquement de sociétés créées entre l’opérateur et le propriétaire pour construire puis exploiter une ferme solaire, qui n’a aucune autre activité économique en tant que telle, qui est un support juridique à un projet circonscrit. Et comme une société se crée pour chaque projet, autant dire que les chiffres doivent être réétudiés à la loupe.
Ce succès de la micro-entreprise peut s’expliquer en partie par le doublement des seuils de chiffre d’affaires permettant d’accéder au régime fiscal simplifié, qui s’élèvent aujourd’hui à 176 200 euros de chiffre d’affaires annuel pour les activités de vente de marchandises, de vente à consommer sur place et de fourniture de logement et à 72 600 euros pour les prestations de services relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou des bénéfices non commerciaux (BNC).
Un véritable choix de vie
Mais l’augmentation des seuils n’explique pas tout, loin de là. Car non, l’engouement pour la micro-entreprise n’est pas un épiphénomène ni un gadget. C’est un véritable phénomène de fonds, un changement de paradigme, une révolution sociétale : de plus en plus de gens veulent être indépendants, ne plus être salariés, donner du sens à leur vie professionnelle. Tenter autre chose, se faire plaisir de manière professionnelle, voire compléter ses revenus salariés par une activité plaisir.
La crise du Covid a sans nul doute été un déclencheur psychologique pour nombre de Français : entre ceux qui, en arrêt forcé, ont été obligés de trouver de nouvelles ressources en eux et se sont découverts de nouveaux talents et d’autres qui avaient, au fond d’eux-mêmes, envie de changer de voie mais qui n’osaient pas, la voie du micro-entrepreneuriat s’est révélé être un tremplin vers une nouvelle vie.
Des catégories socio-professionnelles « + » sont aussi micro-entrepreneurs
Logiquement, les secteurs du transport, de courrier et de restauration rapide, ou encore les activités de vente à domicile et de vente à distance, qui avaient fleuri lors de la crise du Covid, sont en décroissance. En revanche, en 2022, ce sont les activités scientifiques et techniques, la construction et le commerce de détail qui ont le vent en poupe, puisqu’ils concentrent 35 % des immatriculations de l’année.
Ces chiffres cassent totalement l’idée reçue selon laquelle la micro-entreprise, ce serait principalement pour les coursiers, une ubérisation des métiers... Totalement faux ! Dans la réalité, de très nombreux micro-entrepreneurs développent des activités intellectuelles, de conseil, etc. La preuve en est que 133 200 micro-entreprises créées le sont dans les activités spécialisées, scientifiques et techniques (source Insee).
Ces tendances peuvent expliquer que de nombreux métiers sont en tension. La restauration en est un bon exemple : un grand nombre de salariés n’ont pas souhaité reprendre leur poste après la crise du Covid et se sont orientés vers d’autres secteurs qui correspondaient mieux à leurs attentes et à leur choix de vie. Ils se testent désormais pour partie en tant qu’auto-entrepreneurs.
Et Pascal Ferron de prédire que tout cela est bien loin d’être fini.