L'action paulienne portant sur un acte ayant pour effet de faire échapper un bien aux poursuites des créanciers en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler n'est pas conditionnée à la preuve de l'insolvabilité apparente du débiteur.
Une société a révoqué l'expert-comptable auquel elle avait confié une mission de tenue et de suivi de la comptabilité.
Soutenant ne pas avoir été payé des honoraires qui lui étaient dus, l'expert-comptable a assigné la société en paiement.
Après avoir cédé son fonds de commerce, la société a été condamnée à payer une certaine somme à titre d'honoraires à l'expert-comptable puis a été mise en liquidation judiciaire.
L'expert-comptable a alors assigné la cessionnaire et le liquidateur judiciaire afin de lui voir déclarer inopposable la cession de fonds de commerce. Autrement dit, il a eu recours à l'action paulienne qui permet à un créancier d'agir en justice pour faire déclarer inopposables à lui, certains actes passés par son débiteur lorsque ces actes ont été accomplis en fraude de ses droits (article 1341-2 du Code civil).
La fraude aux droits de l'expert-comptable reconnue par la Cour de cassation
La cour d'appel de Douai a rejeté l'action paulienne formée par l'expert-comptable.
Elle a retenu qu'en cédant le fonds de commerce qui lui appartenait, la société avait remplacé un fonds de commerce par une somme d'argent, valeur plus aisément dissimulable, mais que l'expert-comptable ne rapportant pas la preuve de l'insolvabilité, au moins apparente, de la société au moment de la cession, il ne saurait être fait droit à son action paulienne.
Dans un arrêt du 29 janvier 2025 (pourvoi n° 23-20.836), la Cour de cassation considère que les juges du fond ont ainsi ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas.
La chambre commerciale rappelle en effet que selon l'article 1341-2 du code civil, le créancier peut agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.
Le créancier dispose de l'action paulienne lorsque la cession, bien que consentie au prix normal, a pour effet de faire échapper un bien à ses poursuites en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler. Le préjudice du créancier étant ainsi caractérisé, le succès de l'action paulienne n'est alors pas subordonné à la preuve de l'appauvrissement du débiteur.
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