Vital Saint-Marc, Associé du réseau d'audit et de conseil RSM, intervient sur le rôle du directeur financier au service de l'entreprise pour faire face à la crise du Covid-19.
Comment préserver l'activité et la rentabilité de l'entreprise ?
L'idée principale pour conserver un taux de rendement stable est d'éviter la transformation du chiffre d'affaires en paiement et d'anticiper les besoins futurs de trésorerie. Les relances sur les créances impayées ont montré que la grande majorité des entreprises faisaient les efforts nécessaires pour acquitter leurs dettes dans des délais raisonnables. Encore faut-il suivre de près l’état de ses créances.
Pour les entreprises dont la fermeture administrative est imposée, il est indispensable de mettre en place des alternatives, telles que les services de livraison. Le chiffre d'affaires se trouvant amoindri, il convient d'organiser les charges par le recours au chômage partiel ou en négociant la suspension du loyer, chose en réalité assez difficile avec les bailleurs privés.
Lorsque la fermeture administrative peut être évitée, le télétravail conduit au maintien du rendement. Cependant, le temps en période de confinement, toujours plus monotone, fatigue l’ensemble des collaborateurs et agit négativement sur le rendement de l’entreprise. Cette perte ira en grandissant, d’autant qu’elle n’est pas prise en charge par le chômage partiel, lequel n’est applicable qu’aux salariés sans activité. Le maintien d’un lien social permet certainement de retarder cet état d’épuisement mental, mais ne le gomme pas.
Comment établir un prévisionnel réaliste avec peu de visibilité sur l'économie future ?
Il convient tout d'abord d'identifier le prévisionnel le plus probable, pour ensuite établir un prévisionnel dégradé, intégrant les créances irrécouvrables, le besoin de financement et le chiffre d'affaires non encaissable.
Bien évidemment, cela n'est qu'un pari sur le futur. Si les entreprises bénéficiaires du prêt garanti par l’État n'arrivent pas à reprendre l'activité, il faudra les soumettre aux procédures collectives. C'est à ce moment que se manifestera le risque pour l’État et la banque, justifiant la méfiance dans l'octroi du financement. Ils devront rembourser le prêt à la place des entreprises et augmenter leur dette en conséquence.
Les aides d’État permettent-elles un soutien réel des entreprises ?
Le PGE est garanti par l’État entre 70 % et 90 % selon la taille de l'entreprise. Il est faiblement rémunéré, bénéficie d'un différé de remboursement d'un an et est remboursable sur cinq ans. Le prêt rebond et le prêt rebond full digital sont assis sur un besoin trésorerie matérialisé par un prévisionnel. Ils sont garantis à 100 % et sont sans rémunération ni frais de dossier. Ils bénéficient en outre d'un différé de remboursement de deux ans et sont remboursables sur sept ans : cadeau !
En théorie, PGE et prêt rebond semblent cumulables. Les entreprises qui n’ont pu bénéficier du PGE ont une sorte de seconde chance. Cependant, le prêt rebond répond aux mêmes conditions d’octroi : l’entreprise en difficulté, dont les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital, semble en être exclue. Enfin, quand une entreprise a bénéficié d’un PGE, elle doit le mentionner dans sa demande de prêt rebond.
Enfin, on peut à nouveau s'interroger sur l'efficacité de l'aide annoncée pour les TPE, visant à supprimer leurs charges fiscales et sociales, notamment pour les entreprises en chômage partiel qui sont déjà exemptées de charges sociales pour l'indemnité salariale de 84 %.
Propos recueillis par Anne Claire Della Porta