Pour lutter contre l’évasion fiscale estimée à 137 milliards en 2017 dans l’UE, de plus en plus de pays adoptent la facture électronique obligatoire et le modèle clearance.
En France, cette disposition est évoquée dans l’article 56 du projet de loi de finances 2020, pour la facturation inter-entreprises. Celle-ci devrait voir le jour à horizon 2023.
Vers l’adoption du modèle clearance
Si de nombreux arbitrages restent encore à mener, la France se dirige vers l’adoption du modèle clearance, adopté en Italie début 2019. Cette approche permettrait à l’administration fiscale de s’interposer entre l’assujetti et le destinataire. Ce serait donc désormais l’État qui, après enregistrements et contrôles, enverrait les factures ! Mais si cette méthode est aujourd’hui la plus répandue en Europe et dans le monde, aucun modèle clé en main n’existe.
Au Portugal et en Espagne, les entreprises remontent un simple listing de facturation sur une plateforme administrative. La Pologne, l’Angleterre et la Roumanie ont opté en complément pour le split paiement : la facture électronique est réglée hors taxe quand le montant de la TVA est directement assigné sur un compte spécifique. En France, le gouvernement réfléchit à différentes hypothèses dont les modalités seront testées d’ici fin 2022.
Un manque d’harmonisation au niveau européen préjudiciable
Dans un pays qui émet annuellement plus de deux milliards de factures B2B, dont 50 % seulement sont dématérialisées, le défi s’avère conséquent ! Et il le sera encore plus pour les entreprises qui travaillent à l’international : l’absence d’un modèle unique au niveau européen risque en effet de complexifier encore les choses…
Non seulement la facture en tant que document varie d’un pays à l’autre (format, systèmes de certification, contenu des données…) mais il faudra aussi composer avec des plateformes de gestion très variées. Si des tentatives d’harmonisation ont été conduites par l’Europe (système Open People, directives et normes CEN…), aucune n’a réellement abouti à une harmonisation pour les 28 pays. Toutefois, depuis avril dernier, une norme impose aux administrations de supporter deux formats de factures européens (CEN 16931). Le mouvement vers un modèle commun semble donc en bonne voie et le programme Connecting Europe Facility de la Commission s’y attelle.
Les clés du succès : concertation, temps et accompagnement
Quels que soient les arbitrages de la France, cette évolution nécessitera le développement d’une plateforme technique robuste. L’expérience menée depuis quatre ans avec Chorus Pro, qui impose aux fournisseurs de l’administration publique d’émettre des factures dématérialisées sera un atout non négligeable dans le cadre de la généralisation de cette démarche.
En attendant, la réussite de l’implantation du modèle français passera par l’instauration d’une bonne concertation avec toutes les parties prenantes (entreprises, pouvoirs publics et opérateurs), par la proposition de différents canaux d’acquisition des factures, ainsi que par un déploiement progressif du dispositif, afin de laisser aux différents acteurs le temps de s’organiser. Surtout, la clé du succès reposera sur le bon niveau d’accompagnement des entreprises par l’État !
Christophe Viry, Product Marketing Manager, Generix Group