INTERVIEW : Philippe Vincent, Président de la CNCC
Après son élection le 31 octobre, l’ancien président de la CRCC de Versailles et du Centre, Philippe Vincent vient d’entrer pleinement dans son nouveau rôle de Président de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC). Il nous livre sa vision du métier de CAC et nous explique le champ de ses missions à venir ainsi que les orientations qu’il compte donner à la CNCC.
Le Monde du Chiffre : Pouvez-vous nous expliquer les enjeux principaux de la CNCC et la direction que vous souhaitez prendre ?
Philippe Vincent : La CNCC a déjà consolidé les bases de l’utilité d’un CAC pour une entreprise. Mon objectif est de rendre notre rôle incontournable, principalement auprès des PME/ETI. En effet, consulter un commissaire aux comptes doit devenir aussi naturel pour un entrepreneur que de recourir à un avocat. Un dirigeant, quelle que soit la taille de son entreprise, a besoin d’être accompagné pour faire face à la complexité, notamment en termes de financement ou de projet d’expansion sur de nouveaux marchés. Ma mandature sera donc animée par la volonté de nous trouver davantage aux côtés des entreprises dans leurs stratégies économiques.
LMC : Cependant, votre volonté d’occuper davantage le champ des PME/ ETI n’est-elle pas limitée aux seuils de recours à un CAC ?
Ph.V. : Contrairement aux idées reçues, le commissariat aux comptes ne doit pas se limiter aux grandes entreprises. Même une PME avec un chiffre d’affaires de moins de 10 millions d’euros trouvera une valeur ajoutée dans nos services. Instaurer la confiance pour réduire les risques n’est pas d’abord une question de taille, mais bien de complexité. Par conséquent, toutes les entreprises ont besoin, à un moment ou à un autre, de nos services, notamment pour les accompagner dans des périodes de croissance, de restructuration ou encore, dans des phases de turbulence. Dans, la conjoncture économique actuelle et à venir, notre rôle de professionnel de la confiance va jouer pleinement. Le marché des PME et ETI reste donc crucial pour nous.
LMC : Ne risquez-vous pas d’empiéter sur le domaine des experts-comptables qui accompagnent toutes les PME au quotidien ?
Ph.V. : Il ne s’agit pas du tout de marcher sur les plates-bandes des experts-comptables qui bâtissent l’information financière et conseillent les entreprises en matière de gestion et de stratégie. Nos rôles sont bien différents et les dirigeants d’entreprise le savent. La mission du CAC est d’apporter, par son indépendance et son savoir-faire, une fiabilité et une crédibilité forte sur les données-clés et les processus. C’est un travail complémentaire qui ne répond pas aux mêmes objectifs et qui renforce la confiance dans les données sans empiéter sur le conseil. Le code de déontologie extrêmement exigeant qui caractérise notre exercice permet justement aux entreprises de se présenter sereinement face à leur écosystème.
LMC : Comment appréhendez-vous la durabilité, devenue incontournable avec la CSRD ?
Ph.V.: La durabilité est au cœur de nos préoccupations, tant pour l’avenir de la planète que pour notre profession. Nous devons aider les entreprises à intégrer les pratiques durables et mieux valoriser leurs investissements dans ce domaine, et notre savoir-faire en matière d’audit et de confiance trouve ici toute sa pertinence. La CSRD reconnaît particulièrement la compétence des commissaires aux comptes au-delà des chiffres.
L’enjeu maintenant, c'est de réussir la mise en œuvre de la directive, rendue un peu plus complexe avec la publication des normes ESRS extrêmement pointilleuses et détaillées.
Propos recueillis par Samorya Wilson