A l’occasion de la plénière d’ouverture de la 8ème Journée de l’évaluation organisée par la CNCC, le Professeur Philippe Raimbourg (Université Panthéon-Sorbonne et ESCP Europe) s’est exprimé sur la question ardue et terriblement actuelle de l’évaluation des startups.
La start-up « rebelle » aux approches traditionnelles d’évaluation
Comment évaluer une start-up ? « Je ne sais pas », répond d’emblée le Professeur Philippe Raimbourg invitant alors, sur le ton de la plaisanterie, l’aimable assistance de la conférence à quitter prématurément la salle pour une pause-café…
La réponse est certes déconcertante mais correspond selon l’orateur à l’assertion la plus exacte. Evaluer une start-up est en effet un exercice particulièrement périlleux pour les professionnels du chiffre… exercice qui devra néanmoins être effectué car il faut bien que les transactions (investissements, cessions de titres…) se fassent.
L’exercice est périlleux car il suppose une projection financière alors que, même si l’information est faiblement diffusée, peut-être pour éviter que n’en pâtisse l’éclat du « mythe start-up », l’écrasante majorité de ces jeunes entreprises vont in fine au tapis. L’incertitude sur l’avenir de ces entités est telle que l’on a pu parler de « hasard » à ce sujet, rappelle Philippe Raimbourg. Ce serait presque une « loterie » susceptible, cela dit, d’assurer des revenus colossaux aux investisseurs dès lors que le pari serait finalement gagnant.
Il est toujours délicat de parler d’avenir s’agissant de startups. La même difficulté se rencontre pour la construction de business plans.
Le Professeur Philippe Raimbourg souligne qu’en principe, pour évaluer une entreprise, il convient d’établir des scénarios de vente, de coût de production, d’en déduire des scénarios de flux financiers pour ensuite appliquer un multiple au résultat net et en déduire la valeur de la structure. Mais concernant les startups, on ne sait pas construire de tels scénarios, ni déterminer de taux d’actualisation, ni encore chercher des entreprises comparables. L’évaluation des startups résiste manifestement à l’approche traditionnelle.
Innover dans l’évaluation pour évaluer l’entreprise innovante
« Que peut-on faire alors pour que le brouillard se dissipe un peu ? » interroge Philippe Raimbourg. Celui-ci propose une méthode alternative pour estimer la valeur des startups.
Il existe en effet des règles prospectives qui consistent à appliquer le principe suivant : « je ne sais pas ce que sera le futur mais je sais ce que je souhaite qu’il soit ». Ainsi, l’investisseur va partir d’une valeur de sortie souhaitée de l’entreprise pour en déduire une rentabilité également souhaitée, ainsi que des multiples, ce par quoi il aboutira à une valeur d’entrée : la valeur de la start-up.
Bien entendu, le souhait formulé par l’investisseur tiendra compte de la réalité de l’entreprise au moment de la valorisation et notamment des aspects suivants : les caractéristiques de la start-up, le produit ou service commercialisé et dans une large mesure, les hommes, c’est-à-dire les équipes en place (et leur degré d’expérience) au sein de l’entreprise.
Hugues Robert