Le Groupe de travail social de Baker Tilly France donne des précisions sur l'impact du report du prélèvement à la source.
La réforme du prélèvement à la source qui devrait concerner plus de 98 % des foyers, salariés du privé, fonctionnaires, bénéficiaires de revenus de remplacement (pensions de retraite, allocation de chômage), indépendants (commerçants, professions libérales, agriculteurs) et propriétaires de revenus fonciers, s'inscrit dans le « choc de simplification » initié par le Gouvernement Hollande, la France étant le dernier pays d'Europe à ne pas appliquer la retenue à la source.
Si le Gouvernement Macron a annoncé le report de la mise en œuvre du dispositif, il n'en demeure pas moins déterminé à le mettre en place à horizon 2019, laissant le temps au ministère d'effectuer un audit et une expérimentation avec des entreprises volontaires.
Cette année supplémentaire devrait permettre aux employeurs et aux cabinets d'externalisation de la paie de clarifier un certain nombre de questions aujourd'hui sans réponse, comme notamment les sanctions qui pourraient être prises en cas d'erreur de calcul de l'impôt. L'employeur pourra-t-il être sanctionné ? Sera-t-il redevable de la majoration de 10 % sur l'impôt ?
De plus, ce délai supplémentaire laisse aux employeurs le temps nécessaire pour adapter la présentation du bulletin de salaire à la retenue à la source. Ce changement s'ajoute aux modifications prévues dans le cadre de la clarification du bulletin de salaire, qui, elles, s'appliquent à toutes les entreprises à partir du 1er janvier 2018.
> La retenue à la source en pratique
Sur le principe, la mise en œuvre de ce dispositif resterait identique à celle initialement prévue pour 2018 :
- dans le courant de l'été 2018, l'administration fiscale demanderait au salarié de choisir entre un taux réel ou un taux neutre de prélèvement de l'impôt ;
- en octobre 2018 : l'administration fiscale transmettrait à l'employeur un taux de prélèvement (sur la base des revenus perçus en 2017) via la DSN ;
- dès le mois de janvier 2019, ce taux serait appliqué au salaire.
Par la suite, si le revenu diminuait en cours d'année, le montant du prélèvement mensuel diminuerait dans la même proportion (et inversement si le revenu augmentait).
Par ailleurs, le taux de prélèvement de l'impôt pourrait être mis à jour en cours d'année en cas de changement de situation (mariage, naissance, etc.), l'administration fiscale recalculant alors le taux de prélèvement avant de le transmettre à l'employeur.
En effet, les taux de prélèvements pourraient varier en cours de cycle sur demande expresse du salarié à l'administration fiscale, dans un certain nombre de cas :
- le salarié pourrait demander à modifier son taux en cours de cycle en cas de changement de sa situation familiale (mariage, ou PACS, ou décès du conjoint ou partenaire pacsé en cas d'imposition commune, augmentation des charges de famille liées à une naissance, adoption ou au recueil d'un enfant mineur);
- le salarié marié ou pacsé pourrait demander à l'administration fiscale d'individualiser le taux de prélèvement de son foyer fiscal pour tenir compte de l'éventuelle différence de revenu au sein de son couple.
Des situations particulières devront être gérées spécifiquement :
- à défaut d'antériorité fiscale du salarié (exemple : salarié primo-déclarant) ;
- en cas de trop grande antériorité fiscale du salarié (les revenus servant de base au calcul du taux étant antérieurs à N-3) ;
- en cas de nouvelle embauche du salarié que l'employeur n'a pas encore signalée à l'administration;
- en cas de refus du salarié, par souci de confidentialité, de transmettre son taux à l'employeur.
A noter qu'en l'absence de taux ou en cas d'opposition du salarié à la transmission de son taux, l'employeur devra appliquer une grille de taux neutres.
Attention ! Les directeurs de ressources humaines, responsables de ressources humaines, gestionnaires de paie, comptables ou toutes personnes qui auront la charge de la retenue à la source ne se substituent pas à l'administration fiscale. Celle-ci reste le seul interlocuteur du salarié contribuable ; c'est à elle qu'un salarié devra s'adresser pour toute question relative au taux ou au montant de la retenue appliquée par son employeur.
> Impôt 2018 : double imposition ou année blanche ?
Les modalités d'imposition pour 2018 resteront donc inchangées par rapport à celles en vigueur en 2017, les dispositifs concernant l'année de transition étant reportés d'un an.
Il n'y aurait pas de double imposition en 2019 sur les salaires, les retraites, les revenus de remplacement, les revenus des indépendants et les revenus fonciers récurrents.
L'impôt normalement dû au titre des revenus non exceptionnels perçus en 2018 sera annulé par le biais d'un crédit d'impôt spécifique calculé automatiquement par l'administration fiscale sur la base de la déclaration des revenus 2018 déposée au printemps 2019.
Afin d'éviter les abus, la loi prévoit d'ores et déjà des dispositions particulières pour que les contribuables qui seraient en capacité de le faire ne puissent pas majorer artificiellement leurs revenus de l'année 2018.
A noter que le bénéfice des réductions et des crédits d'impôt acquis au titre de 2018 serait maintenu. Les avantages fiscaux donnés sous la forme d'abattement seraient automatiquement intégrés dans le taux, notamment celui de 10 % pour frais professionnels ou l'abattement "journaliste". La déduction des pensions alimentaires serait également prise en compte.
Les réductions et crédits d'impôt ouverts au titre de 2018 seraient maintenus et versés intégralement au moment du solde de l'impôt, à la fin de l'été 2019.