Une tribune de Loriane Rapinat, Directrice associée experte IFRS et Margaux Parent, Manager conseil IFRS au sein du cabinet d’audit et de conseil BM&A.
Préambule
L’Autorité des normes comptables (ANC), dans le cadre de ses recommandations et observations relatives à la prise en compte des effets du Covid-19 dans les comptes établis à compter du 1er janvier 2020, a apporté des précisions quant au traitement comptable et à la présentation des prêts garantis par l’Etat (PGE) dans les états financiers des sociétés emprunteuses établis en normes IFRS.
Rappels contextuels
Jusqu’au 30 juin 2021, les entreprises ont la possibilité de demander un PGE afin de soutenir leur trésorerie, sans qu’aucun remboursement ne soit exigé la première année. A l’issue, elles peuvent choisir d’amortir le prêt sur une durée maximale de cinq ans.
La banque accordant le PGE assure le portage du coût de la garantie sur les douze premiers mois et paie à Bpifrance la prime revenant à l’Etat lors de la notification du prêt. L’emprunteur ne paie la prime qu’à l’issue de la période de douze mois. Le coût de la garantie des années suivantes dépend de la durée additionnelle d’amortissement demandée par l’emprunteur.
Présentation au sein des états financiers des sociétés emprunteuses
Selon l’ANC, qui s’appuie sur le droit inconditionnel d’une entité à différer le remboursement de son prêt au-delà de douze mois (IAS 1.69), une entité peut classer le prêt en passif non courant même sans intention de demander le report du remboursement au-delà de douze mois. Une présentation en passif courant reste possible, sauf si elle envisage de reporter l’amortissement de son emprunt au-delà de douze mois.
A noter que les amendements à IAS 1 applicables à partir du 1er janvier 2023 ou par anticipation (sous réserve de leur adoption par l’Union européenne) imposeraient une présentation en passif non courant tant que l’entité n’a pas renoncé à son droit de différer le remboursement du prêt au-delà de douze mois.
Traitement comptable du coût de la garantie chez l’emprunteur
Le PGE est initialement comptabilisé à sa juste valeur en tant que passif financier. Selon l’ANC, il est possible de retenir une juste valeur égale au montant de la trésorerie reçue net des frais de transaction supportés.
Il doit ensuite être évalué au coût amorti (IFRS 9.4.2.1). Un taux d’intérêt effectif (TIE) est déterminé à la date de souscription du prêt sur la base de la durée probable estimée. Ce TIE tient compte du coût progressif de la garantie dans le temps.
Lorsqu’à l’origine la durée probable estimée du prêt est supérieure à douze mois et qu’elle n’est pas révisée, le seul changement du taux d’intérêt hors garantie est comptabilisé de façon prospective lorsqu’il est connu, conformément à IFRS 9.B5.4.5. En cas de révision de la durée probable, la modification des flux liée à celle du coût de la garantie est comptabilisée comme un ajustement de l’emprunt, en contrepartie du résultat, par actualisation des nouveaux flux de trésorerie au TIE d’origine, conformément à IFRS 9.B5.4.6. La révision du taux d’intérêt reste traitée prospectivement.
Si à l’origine la durée estimée était égale à douze mois, le droit à une période d’amortissement complémentaire est considéré comme un engagement hors-bilan. En cas d’exercice de ce droit, un nouveau financement sera comptabilisé avec un TIE établi sur la base des conditions applicables à cette période complémentaire.
L’annexe devra présenter une information détaillée sur le traitement comptable retenu ainsi que le montant et les caractéristiques du prêt.
Conclusion
La loi de finances pour 2021 a prolongé la période d’octroi des PGE du 31 décembre 2020 au 30 juin 2021. En outre, il a été convenu en janvier 2021 avec la Fédération bancaire française, que toutes les entreprises qui le souhaitent aient le droit d’obtenir un différé d’un an supplémentaire pour commencer à rembourser leur PGE.
Ces mesures vont assurément conduire les entreprises à s’interroger plus amplement sur le traitement comptable du PGE et ce, tout au long de l’année 2021.
Loriane Rapinat, Directrice associée experte IFRS et Margaux Parent, Manager conseil IFRS, BM&A