Denis Lesprit : "Notre rôle est aussi d'aider les entreprises dans leur financement et leur développement en apportant de la confiance."

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denis-lesprit-2016A l’occasion des 29èmes Assises annuelles de la CNCC, son président Denis Lesprit fait le point pour le Monde du Chiffre sur les nouveaux axes de la profession.

 

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En quelques mots, qu'avez-vous pensé de cette dernière édition des Assises de la CNCC ?

Ces assises ont permis à la profession de se projeter vers l'avenir alors que nous sortons de plusieurs années marquées par la mise en place de la réforme européenne de l'audit initiée en 2010 et qui a mobilisé les institutions ordinales et a été source d'inquiétude pour les professionnels. Le thème de la digitalisation de la profession nous sort d'une posture où nous avons subi les événements pour pousser les auditeurs à reprendre en main leur stratégie de développement.

En quoi le numérique a-t-il un impact sur les différentes missions du commissaire aux comptes ?

L’intelligence artificielle, le big data, le cloud, la blockchain ou la signature électronique sont autant d'évolutions technologiques qui impliquent une transformation en profondeur de la profession. Alors qu'elle travaillait hier sur des applications fermées, elle bascule aujourd’hui sur des plateformes ouvertes où les fournisseurs comme les clients ont accès aux données. Ceci bouleverse la façon dont les flux financiers vont se comptabiliser mais aussi la manière de concevoir les audits. L’autonomisation des suivis, le traitement des données, l’identification de risques émergents forcent à repenser le métier d’auditeur.
Pour les cabinets, il s’agit aussi d’accompagner la transition numérique de leurs clients tout en garantissant la confidentialité et la protection des données. L’environnement qui s’ouvre à la profession est un environnement où l’information va circuler entre serveurs, va être stockée sur le cloud, où elle pourra être placée en position de risque. Comment organise-t-on le partage des informations, leur archivage, jusqu’à quel point peut-on se permettre de ne pas conserver les documents originaux ? Peut-on utiliser la signature électronique ? Tous ces enjeux ont été au cœur de la réflexion des Assises. Une réflexion qui inclut également de porter un regard attentif sur la pertinence des algorithmes utilisés.

Comment voyez-vous l'avenir du métier de commissaire aux comptes ?

Le numérique nous permet d'envisager avec confiance un avenir car il nous libérera du temps pour nous consacrer à ce qui fait la valeur ajoutée de notre mission, en permettant à l’auditeur d’être dans l’esprit critique, dans la compréhension et la vérification des requêtes. Cela renforce aussi la place de notre jugement professionnel. Nous serons plus efficaces dans notre mission grâce à l'automatisation de ces requêtes et à des contrôles plus exhaustifs. Nous pourrons de ce fait davantage jouer notre rôle aux côtés du dirigeant, partager avec lui notre connaissance intime des rouages financiers de son entreprise et le benchmark sectoriel tiré de notre expérience, tout en sécurisant ses processus financiers et de contrôle interne.
En quelques mots, orienter le développement et attirer l'attention sur les situations à risques. Et puis notre rôle est aussi d'aider les entreprises dans leur financement et leur développement en apportant de la confiance, une valeur qui est de plus en plus précieuse aujourd'hui.

Quel bilan tirez-vous de l'action de la CNCC sur la réforme européenne de l'audit ?

Les instances professionnelles ont énormément travaillé pour que soient préservées les spécificités de l'exercice de commissariat aux comptes français. Le bilan est en demi-teinte. D’un côté nous avons préservé le co-commissariat et le principe d'un audit proportionné dans nos PME, mais de l'autre, on se retrouve avec un règlement européen à dix neuf options qui n'est pas à même de garantir l'harmonisation des pratiques d'audit en Europe.
En outre, nous avons mis en garde les pouvoirs publics depuis l'origine sur le fait que la rotation accélérée des cabinets et des signataires pouvait avoir un effet contraire à celui escompté en contribuant à concentrer le marché de l'audit par la multiplication des appels d'offre et une pression sur les tarifs.

Propos recueillis par Pascale Breton

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