Résultats de la 5ème édition du baromètre réalisé par PREVISOFT & ATEQUACY.
Dès le 1er juillet 2016, le compte personnel de prévention de la pénibilité intégrera 6 nouveaux facteurs. Les entreprises sont-elles à jour de leurs obligations ? Ont-elles réalisé leurs diagnostics et leurs accords ? Comment se sont-elles adaptées aux évolutions règlementaires ? Quelle part de leur effectif est soumise à la pénibilité ? Comment s’appuient-elles sur le travail des branches professionnelles ? Autant de questions que PREVISOFT & ATEQUACY ont posées aux responsables RH & sécurité dans le cadre de la 5ème édition du baromètre pénibilité. Ce baromètre a été réalisé par la Junior ESSEC Conseil, du 27 février au 20 mars 2016, auprès de 200 entreprises françaises de tous secteurs avec un effectif supérieur à 50 personnes, interrogées par le biais d’un questionnaire téléphonique.
Les facteurs de pénibilité les plus fréquents
A quels facteurs de pénibilité les salariés sont-ils les plus exposés, au-delà des seuils ?
Le bruit, les postures pénibles et le travail répétitif sont les facteurs de pénibilité qui reviennent le plus fréquemment. En effet, 37% des entreprises interrogées affirment avoir des salariés exposés à ces 3 facteurs pénibilité au-delà des seuils définis par la loi.
33% des entreprises pointent des expositions à la pénibilité au-delà des seuils à travers la manutention manuelle de charge, 32% pour le travail de nuit, 26% pour le travail en équipes successives alternantes, 23% pour les agents chimiques dangereux et 17% pour les vibrations mécaniques.
Seules 4% des entreprises relèvent des dépassements de seuil pour un travail avec des températures extrêmes et 3% pour des activités en milieu hyperbare. Ces 2 facteurs pénibilité sont naturellement moins fréquents car liés à des activités assez spécifiques.
La mesure de l’exposition a la pénibilité
Les entreprises disposent-elles des outils de mesure pour évaluer les conditions de pénibilité ?
75% des entreprises disent avoir les outils pour identifier les salariés qui dépassent les seuils de pénibilité (soit+5% qu’en 2015). Trois ans après la déclinaison des 10 facteurs de pénibilité, les entreprises et les institutions progressent dans la mise en place de moyens et d’outils pour l’évaluation des conditions de travail. Certaines branches professionnelles aident notamment les entreprises à effectuer ce travail de mesure.
Clarisse Petit, consultante prévention des risques professionnels chez PREVISOFT, rappelle que la difficulté de la mesure de l’exposition à la pénibilité varie selon les facteurs de pénibilité. « Les facteurs de pénibilité comme le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes, les températures extrêmes, et le travail en milieu hyperbare sont relativement faciles à évaluer car il s’agit de mesures strictes. L’évaluation du facteur bruit demande souvent l’intervention d’un expert avec des outils de mesure spécifiques. Pour les vibrations mécaniques et les agents chimiques, il existe des outils de mesure relativement performants (fournis par des organismes du type de l’INRS) qui facilitent beaucoup l’estimation du niveau de pénibilité. Quant à la manutention de charges lourdes et les postures pénibles, ils nécessitent un temps d’observation conséquent (au minimum une semaine pour obtenir une moyenne fiable) et un entretien avec le salarié. La tâche se révèle d’autant plus compliquée quand la polyvalence de certains salariés entre en compte. »
A noter : Pas de poly-exposition possible cumulant travail de nuit et travail en équipes successives alternantes. La règlementation précise que, désormais, un salarié déclaré comme « travailleur en équipes successives alternante » (de ce fait, celui-ci travaille de nuit), ne peut également être déclaré comme « travailleur de nuit ». En somme, un salarié travaillant la nuit sera déclaré en tant que tel et un salarié travaillant au sein d’une équipe successive alternante ne sera pas considéré comme « poly-exposé », bien qu’il travaille la nuit.
Les entreprises prennent-elles en compte les moyens de prévention existants dans la mesure du niveau d’exposition des facteurs pénibilité ?
La loi du 20 janvier 2014 prévoit la prise en compte des Equipements de Protection Individuels et Collectifs dans l’évaluation du niveau de pénibilité d’un poste par rapport au seuil fixé par la loi.
81% d’entreprises déclarent prendre en compte les moyens de prévention existants pour mesurer l’exposition à la pénibilité (soit +11% qu’en 2015). Ces moyens techniques, organisationnels et humains peuvent être intrinsèque, collectifs, individuels, de formation ou d’information.
La négociation des accords pénibilité
L’obligation de négocier un accord pénibilité pèse sur les entreprises d’au moins 50 salariés, ou appartenant à un groupe d’au moins 50 salariés, qui emploient au moins 50 % de salariés exposés aux facteurs de pénibilité au-delà des seuils. L’effectif est apprécié au 31 décembre de chaque année.
Combien d’entreprises sont dans l’obligation de négocier un accord pénibilité ?
Près d’une entreprise sur 10 est actuellement dans l’obligation de négocier un accord pénibilité. En effet, cette année, 9% des entreprises interrogées ont déclaré avoir plus de 50% de leurs effectifs dépassant les seuils de pénibilité pour au moins l’un des 10 facteurs. (Contre 17% en 2015 et 48% en 2014). On constate une réelle chute du nombre d’entreprises déclarant avoir plus de 50% de leur effectif soumis à la pénibilité.
Comment expliquer cette baisse par rapport aux années précédentes ? Avant 2014, les seuils de pénibilité étaient laissés à la libre appréciation des entreprises. Depuis le décret du 9 octobre 2014, ces seuils sont précisément définis par la loi. Pour ATEQUACY & PREVISOFT, la baisse importante du nombre d’entreprises estimant que plus de 50% de leur effectif est soumis à au moins l’un des 10 facteurs de pénibilité est due au réajustement de l’estimation des seuils avec la loi.
« Les entreprises ont tout à gagner sur le long terme, en adoptant des démarches préventives dès lors que le salarié est exposé à la pénibilité, que le seuil soit dépassé ou non. », rappelle Clarisse PETIT. « D’une part, car l’exposition des salariés et les seuils peuvent être évolutifs, et d’autre part, parce que les salariés soumis à la pénibilité même en deçà des seuils, peuvent contracter des maladies professionnelles, engendrant des coûts associés pour l’entreprise. »
Quel impact de l’élargissement de la négociation des accords en 2018 ?
Le décret du 9 octobre 2014 relatif aux accords en faveur de la prévention de la pénibilité prévoit qu’en 2018, les entreprises auront l’obligation de négocier un accord dès lors que 25% de leurs effectifs sont soumis au-delà des seuils à 1 des 10 facteurs au moins.
1 entreprise sur 4 serait concernée par la négociation d’un accord pénibilité au 1er janvier 2018, sur la base du panel étudié. « Anticipation » est le maître mot pour les entreprises qui estiment avoir aujourd’hui entre 25 et 50% de leur effectif exposé à la pénibilité au-delà des seuils.
Aujourd’hui, combien d’entreprises ont déjà négocié un accord pénibilité ?
Quatre ans après la mise en place des obligations pénibilité, peu d’entreprises restent immobiles : 16% affirment avoir déjà mis en place un accord, 5% sont en cours de négociation tandis que 75% se disent non concernées par l’obligation. Seules 3% des entreprises semblent dans l’expectative. Pour PREVISOFT & ATEQUACY, ces entreprises sont très probablement dans l’attente d’un référentiel de branche sur leur secteur d’activité.
Par ailleurs, l’enquête révèle que 56% des entreprises dont plus 25% de l’effectif est soumis à un ou plusieurs seuils pénibilité n’ont pas encore entamé de négociation d’un accord pénibilité. Dès 2018, il leur faudra être à jour de cette obligation.
La déclaration des salariés soumis a la pénibilité
Depuis le 1er Janvier 2015, les fiches individuelles de prévention de la pénibilité ont été remplacées par une déclaration annuelle dématérialisée à la CNAV ou à la CARSAT via la DSN/DADS. (Loi Rebsamen - Décret du 30 décembre 2015)
Les entreprises ont elles déclaré leurs salariés soumis à la pénibilité via leur logiciel de paie ?
65% des entreprises interrogées ont déclaré leurs salariés dépassant les seuils de pénibilité via leur logiciel ou leur système de paie. C’est au paragraphe S65 de la DADS/DSN que l’employeur doit renseigner : La date du début et fin de contrat pour les CDD ou la date d’exposition annuelle pour les CDI et le code qui correspond au facteur de pénibilité (par exemple : code 10 pour le travail répétitif).
La prise en compte du document unique dans le diagnostic pénibilité
Le décret du 9 octobre 2014 indique que l'employeur doit consigner, en annexe du document unique, les données collectives utiles à l'évaluation des expositions individuelles aux facteurs de risques et la proportion de salariés exposés aux facteurs de risques professionnels au-delà des seuils prévus.
79% des entreprises interrogées affirment avoir formalisé un document unique (DUER). Et parmi elles, 87% précisent l’avoir mis à jour en 2015. Pour PREVISOFT & ATEQUACY, l’obligation de consigner le diagnostic pénibilité au Document Unique contribue probablement à ces nombreuses mises à jour.
A ce sujet, une entreprise sur deux déclare avoir procédé à la consignation du diagnostic pénibilité en annexe du Document Unique. « Toutes les entreprises n’étant pas concernées par les 4 facteurs pénibilité applicables en janvier 2015, nombre d’entre elle n’ont pas encore eu à réaliser de diagnostic sur l’année 2015. » précise Clarisse PETIT, « En revanche, les 6 facteurs applicable en juillet 2016 concernent de nombreuses entreprises. Celles-ci devront donc se pencher sur la question d’ici la fin de l’année. »
La consultation des branches professionnelles
Le décret du 30 décembre 2015 prévoit que les branches professionnelles mettent à disposition des entreprises un référentiel permettant de faciliter la démarche pénibilité. Les entreprises d’au moins 50 salariés et dont la moitié de l’effectif est exposé au-delà des seuils fixés, doivent signer un accord (d’entreprise, de groupe ou de branche étendu) afin de mettre en place un plan d’action.
Les entreprises s’appuient-elles sur le travail des branches professionnelles sur la pénibilité ?
65% des entreprises interrogées se sont intéressées au travail des branches professionnelles sur les référentiels pénibilité.
Une entreprise sur deux pense opter pour une évaluation collective de l’exposition à la pénibilité via un accord de branche étendu. Cela confirme l’attente importante des entreprises envers le travail des branches professionnelles en matière de pénibilité.
Néanmoins, toutes les branches ne sont pas encore prêtes. 34% des entreprises qui souhaitent réaliser une évaluation collective, disent ne pas avoir reçu d’information de la part de leur branche. A ce jour en effet, aucune branche professionnelle n’a encore présenté son référentiel pour être homologué.
La consultation des partenaires sociaux et du CHSCT
Comme pour tout accord collectif, les entreprises sont dans l’obligation de consulter leurs organisations syndicales pour mettre en place leur accord pénibilité.
En 2016, 60% des entreprises affirment avoir consulté leurs partenaires sociaux sur la gestion de la pénibilité soit 6% de moins que l’année dernière. Pour PREVISOFT & ATEQUACY, le report de la prise en compte des 6 facteurs à juillet 2016, a permis aux entreprises de gérer d’autres priorités et, peut-être, de repousser la consultation de leurs partenaires sociaux.
L’article 7 de la loi du 20 janvier 2014 a renforcé les pouvoirs du CHSCT en matière de pénibilité. Au moins une fois par an, l’employeur doit présenter au CHSCT un bilan général sur la santé et la sécurité au travail, et un programme annuel de prévention des risques professionnels.
Cette année, 77% des entreprises ont consulté le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) sur les questions relatives à la pénibilité, contre 60% en 2015. « Les entreprises ont conscience du rôle déterminant du CHSCT. » ajoute Clarisse PETIT, « Néanmoins, sur le terrain on constate souvent que les membres du CHSCT manquent encore de formation et d’information au sujet de la pénibilité. »
Le financement du compte personnel de prévention de la pénibilité
Les entreprises savent-elles que le compte de prévention de pénibilité est financé par une double cotisation à la charge des entreprises ?
En 2016, 83% des entreprises savent que le compte de prévention de pénibilité est financé par une double cotisation à leur charge. L’année dernière, elles étaient seulement 50% à être au courant de cette mesure. Les entreprises sont à présent mieux informées.
A noter : Le Conseil d’Etat a annulé, par une décision du 4 mars 2016, le taux de la cotisation additionnelle due par les employeurs ayant exposé leurs salariés à un ou plusieurs facteurs de pénibilité. Il a été considéré que les taux de cette cotisation additionnelle n’avaient pas été définis à un niveau assez élevé conformément à l’article L. 4162-20 de la loi du 20 janvier 2014.